Recovery-as-a-Service (RaaS) : une révolution pour le secours informatique ?

Non contents d’avoir déjà décliné une bonne partie des lettres de l’alphabet à la sauce « As A Service », les fournisseurs de service en ont trouvé un nouveau : le « Recovery-as-a-Service » ou RaaS [1]. Arrivées vers la fin 2009 aux États-Unis par le biais de startups, les offres RaaS y sont désormais proposées par les principaux acteurs de la continuité informatique, Sungard Availability Services et IBM BC&RS en tête. Alors le RaaS, révolution ou pas ?

Le RaaS : fer de lance des « Cloud Recovery Services »

Comme pour beaucoup de ce qui tourne autour du cloud, il est parfois difficile de donner une définition précise de ce dont on parle, tant une même appellation peut cacher des offres différentes. Nous utiliserons la définition suivante : « Cloud Recovery Service => secours d’un système d’information sur une infrastructure virtualisée, hébergée par un tiers, disponible à la demande et facturée à l’utilisation. »

L’éventail des possibilités est très large :

  •  d’une sauvegarde externalisée des données critiques en mode cloud (« Backup-as-a-Service ») …
  •  …en passant par la construction par le client lui-même de son secours sur la base d’une prestation de type « IaaS » [2] …
  •   …jusqu’à une offre complètement managée intégrant le suivi du SI nominal et des mécanismes de bascule planifiés. C’est ce type de prestations que l’on retrouve sous l’appellation « Recovery-as-a-Service ».

 Quel est l’intérêt de passer au RaaS ?

L’utilisation du RaaS résulte avant tout d’un choix économique. Sur le papier du moins, le secours paraît adapté au modèle de facturation du cloud (pas de sinistre > allocation limitée de ressources > coût d’utilisation réduit), alors qu’un secours traditionnel implique de stocker, héberger et faire évoluer des infrastructures, des serveurs et des applications sur un site de secours.

Mais à y regarder de plus près, les économies ne sont pas toujours au rendez-vous et varient grandement en fonction des applications. Si certaines d’entre elles, peu consommatrices de données, sont les candidates idéales pour le RaaS (des études indépendantes font état d’environ 80% d’économies [3] pour leur secours par rapport à l’approche traditionnelle), le ROI pour les applications plus lourdes et/ou pour lesquels les exigences de continuité sont plus fortes s’avère discutable. En effet, plus les RTO et RPO seront exigeants, plus le niveau de service devra être élevé (allocation renforcée de ressources, mécanismes de réplication des données site-à-site, liens sécurisés, supervision 24/7, etc.) entraînant une envolée des coûts à la clef.

Le RaaS s’assimile, à ce stade de sa maturité, au mieux à du « warm recovery ». En effet, il est aujourd’hui illusoire de penser que les solutions proposées permettront de la haute-disponibilité : délais d’activation, délais relatifs aux opérations de bascule notamment au niveau du réseau, délais de restauration en cas de corruption des données, etc.

En outre, le RaaS repose essentiellement sur des mécanismes de virtualisation de serveurs (le plus souvent restreints aux architectures Intel x86, à l’exception de quelques fournisseurs), que ne supportent pas tous les progiciels du marché, a fortiori les applications propriétaires des clients.

Ainsi, le fait de vouloir tirer pleinement parti de la compétitivité économique du RaaS tout en répondant aux besoins Métiers réduit son utilisation à une certaine catégorie d’applications. Ce faisant, il cantonne le RaaS en tant que solution complémentaire à un secours traditionnel, ce qui peut paradoxalement devenir une source de complexité, du fait de la cohabitation de deux SI de secours. Néanmoins, deux cas d’usage du RaaS émergent pour les organisations concernées :

  •  La couverture des applications virtualisées ou éligibles à la virtualisation à coût optimisé
  •  L’extension du secours à des périmètres qui n’auraient pas pu être intégrés au Plan de Continuité Informatique de l’organisation, pour une meilleure couverture au meilleur coût.

 

A qui s’adressent les offres RaaS ?

Étant donné son modèle économique et sa structure technique, le RaaS semble plus adapté aux moyennes structures (qui n’ont pas souvent la surface financière pour mettre en œuvre et gérer en propre un site de secours) et notamment à celles qui ont opéré la virtualisation de leur SI. Les études prospectives [4] le montrent : ce sont elles qui tireront la croissance de ce marché dans les prochaines années.

Les grandes organisations déjà dotées de Plans de Continuité Informatique seront probablement moins intéressées mais pourront néanmoins trouver dans le RaaS des réponses ciblées à certains de leurs besoins.

Le RaaS : une offre mature ?

Comme pour nombre de cloud services, le RaaS n’a pas encore atteint sa pleine maturité : en témoigne le foisonnement des offres et des prestataires notamment aux États-Unis et au Royaume-Uni. Au-delà des acteurs historiques de la continuité informatique se positionnent des pure-players des cloud recovery services et de plus en plus des hébergeurs informatiques, convertis au cloud.

Le marché se structure, les offres évoluent en recherchant notamment de la complémentarité avec les cloud services : des initiatives d’interopérabilité entre services IaaS et RaaS se font jour pour assurer du secours « cloud-to-cloud » par exemple.

A ce stade et en terme de couverture de risques, le RaaS doit faire ses preuves. Concrètement les infrastructures dévolues au RaaS reposent sur encore peu de datacenters. Le client qui souhaitera se prémunir de sinistres affectant des zones géographiques particulières (ou étendues) devra se rapprocher du fournisseur de service RaaS qui l’intéresse pour vérifier que son ou ses sites ne sont pas exposés aux mêmes risques.

En France, le marché reste jeune et sans retour d’expérience significatif de déploiement. Les grands offreurs français s’appuient, aujourd’hui, sur les infrastructures anglo-saxonnes ou nord-américaines de leur maison-mère (ce qui potentiellement impacte la qualité de service, le niveau de sécurité, les engagements contractuels, etc.). Reste donc aux acteurs, anciens comme nouveaux, à démontrer toute la pertinence de leurs offres, en particulier sur la gamme des services managés, probablement les plus recherchés par les DSI.

 

[1] On rencontre également l’acronyme DRaaS (Disaster Recovery-as-a-Service)

[2] IaaS : Infrastructure-as-a-Service

[3] « Disaster Recovery as a Cloud Service : Economic Benefits & Deployment Challenges »

[4] « Gartner Says 30 Percent of Midsize Companies Will Use Recovery-as-a-Service by 2014 »

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