SI industriel et sécurité : oser la transformation (partie 1)

La sécurité des Systèmes d’Informations Industriels (SII) est aujourd’hui au centre des préoccupations dans les entreprises concernées. Ces systèmes qui permettent une action directe dans le monde «physique» à l’aide d’instructions provenant du monde « logique» pilotent les outils de production de nombreuses entreprises. Au-delà des risques environnementaux et humains, ils représentent également un enjeu stratégique pour les États. La récente multiplication des incidents nécessite donc de se mobiliser pour les sécuriser et d’amorcer une transformation. Mais par où commencer quand la sécurité a été laissée de côté pendant de nombreuses années ?

 Des systèmes bien spécifiques…

Les SII permettent d’assurer le pilotage des outils de production (chaînes de montage, machines-outils, fours, scanners médicaux, climatisations, aiguillages, pipelines, etc.). De plus en plus ouverts, ils deviennent une vraie passerelle entre les processus de production et le Système d’Information de Gestion (SIG) de l’entreprise.Un SII est souvent modélisé en différentes  couches. La première couche concerne le  procédé physique lui-même. La seconde regroupe les capteurs, actuateurs, actionneurs et autres composants électroniques intelligents (IED) qui interagissent physiquement avec le procédé. La troisième couche assure la supervision et le pilotage du procédé. Elle est composée d’éléments tels que les SCADA (Supervisory Control and Data Acquisition), des automates ou PLC (Programmable Logic Controller) et des équipements distants, les RTU (Remote Terminal Unit). La quatrième couche regroupe les fonctions et outils de management des opérations de production.

Enfin, la cinquième et dernière couche est tournée vers les fonctions avancées de planification, la logistique ou l’approvisionnement, souvent interfacée avec les ERP. Initialement développés pour l’industrie, les  systèmes construits sur le même modèle se sont largement répandus. Systèmes embarqués dans les voitures ou avions, imagerie  médicale (scanner, IRM, etc.), systèmes plus  étendus comme les smart grids, etc. : les SII sont devenus omniprésents !

 …et des menaces accrues

À l’origine les SII étaient isolés au sein d’un  site ou d’une usine, mais aujourd’hui ils  se doivent d’être largement interconnectés pour accroître productivité et compétitivité.
Cette interconnexion permet de nombreux nouveaux usages mais augmente considérablement l’exposition aux cyberattaques. La majorité de ces systèmes n’ont en effet pas été conçus pour une ouverture sécurisée et sont d’autant plus vulnérables.

Ainsi, depuis plusieurs années les attaques d’États ou d’individus malveillants se multiplient. Les conséquences peuvent être considérables pour la sécurité des biens et des personnes, avec des scénarios graves menant par exemple au déversement de produits toxiques dans des systèmes de gestion des eaux ou l’explosion de pipelines. Des risques de confidentialité sont également présents : l’accès aux chaînes de production autorise l’accès à des secrets de fabrication industriels et le vol de propriété intellectuelle.

Les États réagissent pour faire face aux menaces sur ces systèmes. Sur le continent nord-Américain, la conformité au standard NERC-CIP est devenue obligatoire pour les opérateurs de réseaux électriques. En France, l’ANSSI a déjà lancé plusieurs initiatives qui visent à définir un cadre de protection minimum pour les installations les plus critiques. Les entreprises doivent donc dès maintenant se préparer pour être en capacité de répondre à ces nouvelles exigences.

 Penser la sécurité des SII différemment

La sécurisation des SII nécessite d’intégrer de nouvelles contraintes pour définir des solutions adaptées. En effet, vouloir appliquer les bonnes pratiques de sécurité conventionnelles serait une erreur car les SI industriels présentent des caractéristiques différentes des SI de gestion.

L’échelle de temps est bien spécifique. Les lignes de production sont souvent conçues pour une durée de vie de l’ordre de 10 à 15 ans, parfois même au-delà. Par exemple, dans certains secteurs comme celui des réseaux électriques, les équipements sont censés être en place pendant plusieurs dizaines d’années.

La disponibilité et la sûreté sont au cœur des attentions. Dans cet univers spécifique, le critère de disponibilité est primordial. De plus, dans les environnements à risques (SEVESO, nucléaire, etc.) le maintien des fonctions de sûreté qui assurent la protection des hommeset de l’environnement est essentiel.

Les fournisseurs imposent des solutions packagées de bout en bout. Et ils sont souvent réticents à appliquer les bonnes pratiques de sécurité, même lorsque leurs systèmes reposent sur des solutions peu sécurisées issues des SI de gestion… Si des améliorations ont déjà été notées, le chemin à parcourir reste long.

Les contextes d’implantation sont particuliers et rendent le maintien en condition opérationnelle de la sécurité complexe. Il n’est pas rare d’avoir une partie du système (voire le système entier) localisée des sites distants, parfois inoccupés, difficiles d’accès, et où les conditions peuvent être « hostiles ».

Cela concerne par exemple les SII présents sur les plates-formes pétrolières, les pipelines gaziers ou pétroliers, ou encore les réseaux d’eau.

Dans ces conditions, comment initier une démarche de sécurisation ? Quelles sont les premières étapes ? (à suivre).

 

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