Les entreprises face à une crue exceptionnelle

Les Parisiens sont prévenus : la Seine connaîtra à nouveau une crue comparable à celle de 1910. Ils ne seront pas les seuls touchés. La Marne débordant aussi, toute la région est concernée, de sorte qu’il convient de parler de crue exceptionnelle en Ile-de-France.

Aujourd’hui, les conséquences d’une crue similaire seraient diverses : arrêt des transports et difficultés de circulations, absentéisme dans les entreprises et les services publics, coupures électriques, eau non potable, etc.

Face à ces impacts variés, l’arrêt d’une grande partie des activités des entreprises est inéluctable. Mais les responsables de la continuité de l’activité des entreprises ne sont pas totalement démunis. Une inondation se déroule en trois temps : montée des eaux, pic de crue, décrue. Cette progressivité permet d’anticiper les impacts et donc les solutions à mettre en place.

Avant la crue et jusqu’à la montée des eaux, scénariser la crise et adopter les mesures de sauvegardes

« Quand on commence avec des certitudes, on termine avec des doutes ». La crue exceptionnelle illustre parfaitement cette maxime de Francis Bacon. Il est certain qu’elle arrivera, sans qu’on sache exactement à quoi nous attendre à ce moment-là.

Pour éclairer les zones d’ombres, de nombreuses études sont toutefois disponibles (études DIREN, PPRI des communes…). Malgré tout, des questions resteront posées. Paris ne présente plus le même visage qu’au début du siècle dernier. L’évolution des sols et sous-sols rend partiellement caduques les cartes de 1910. Les modélisations existantes ne tiennent pas compte de tous les paramètres (remontées d’eau dans les sous-sols notamment), de sorte qu’il n’est pas possible d’anticiper précisément les impacts.

Enfin, et surtout, la crue pourrait être bien plus virulente, comme ce fut le cas à Prague en 2002, invalidant toutes les prévisions basées sur les hauteurs d’eau de 1910.

En tenant compte de tous ces paramètres, et en acceptant de ne pas tout maîtriser, le responsable de la continuité d’activité pourra réaliser son analyse d’impact. Suite à celle-ci, il sera en mesure de lancer immédiatement des actions conservatoires (remontée ou déménagement de ressources clés) et de bâtir un scenario de crise en plusieurs étapes (vigilance, alerte, mobilisation, …) en fonction de la montée des eaux et de la chronologie des évènements associés

Cette scénarisation permettra de définir une procédure « crue » à dérouler lorsque les eaux monteront.

Pour chacune des étapes anticipées lors de la montée des eaux, un ensemble d’actions sera mis en œuvre pour se prémunir au mieux des conséquences sans perturbation de l’entreprise au quotidien : pré-mobilisation de la cellule de crise, remontée d’équipements dans les étages, vérification des dispositifs de secours et de sauvegarde, installations de batardeaux…

Adapter au mieux son PCA pendant le pic et la décrue

En situation de « pic de crue », certainement deux à trois semaines, les impacts sur l’entreprise mais plus globalement sur l’ensemble de la région Ile de France seront extrêmement conséquents. Impossible dès lors de couvrir le risque comme avec un PCA classique.

Le Plan de Continuité d’Activité « crue » devra savoir s’adapter à cette situation exceptionnelle, et ne plus chercher à couvrir toutes les fonctions critiques de l’entreprise mais bien uniquement les fonctions absolument vitales et les organes de crise auxquels devront être dédiés tous les moyens disponibles. Le RPCA doit faire son deuil d’une continuité de l’ensemble des activités, même celles habituellement reprises.

Les solutions classiques des PCA devront également être évaluées au regard des contraintes spécifiques du « pic de crue » : le nomadisme repose sur des infrastructures dont rien ne garantit le bon fonctionnement en situation de crue, le repli doit prendre en compte le lieu d’hébergement des collaborateurs (la Seine et la Marne ne pouvant être franchies)…

La décrue des fleuves peut durer plusieurs semaines (35 jours en 1910), et durera a minima plusieurs mois pour les entreprises touchées : nettoyage des bâtiments, consolidation des fondations, remise en état d’équipements, réapprovisionnements…

Pour autant, les actions à mettre en œuvre au cours de ces étapes ne peuvent être formalisées de façon précise tant que la crue ne s’est pas déroulée. Le RPCA devra plutôt s’attacher à dégager les grands principes qui guideront la reprise progressive des activités durant cette étape : abandon/remise en fonction des bâtiments, activités à reprendre en priorité, pré-contractualisation de stock de reprise, etc.

Se focaliser sur l’essentiel pour faire face à la crue

Il est impossible de prévoir et traiter intégralement une crue exceptionnelle. Toutefois, aborder la problématique en amont permettra de scénariser la crise et de prévoir les actions de limitation de ses conséquences.

Les impacts résiduels seront traités par des solutions PCA « plus classiques », couvrant ce qui ne peut être protégé, mais doit être préservé.

In fine, se préparer à faire face à la crue, c’est initier la prise en compte des chocs extrêmes, sinistres pour lesquels tous les impacts ne peuvent être couverts, rendant la hiérarchisation des activités vitales encore plus essentielle à la continuité.


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