Energies fossiles : énergies de transition ou énergies durables ?

Energies polluantes car carbonées, chères car importées et dont les réserves réelles ne sont pas maîtrisées : il ne fait pas bon être une énergie fossile en France par les temps qui courent. La facture énergétique du pays s’élève en 2012 à 69 milliards d’euros  et pèse lourd sur le déficit commercial français. Cette hausse continue s’explique surtout par la dépendance énergétique de la France à ces énergies fossiles (la France importe 98% de son gaz naturel et 99% de son pétrole et de son charbon). Afin de maîtriser ce déficit et d’atteindre les objectifs européens de réduction d’émission de gaz à effet de serre (-80% d’ici 2050), la France devra nécessairement faire évoluer son bouquet énergétique, augmenter la part des énergies renouvelables et baisser la consommation de combustibles. Mais peut-on imaginer un mix énergétique sans énergies fossiles ?

Concurrence ou complémentarité ?

Peut-être à l’horizon 2100 en Europe selon l’IFPEN, mais vraisemblablement pas avant. La plupart des analyses tablent à l’horizon 2050 sur une part des énergies non fossiles dans le mix européen ne dépassant pas 30 à 40 %. D’abord parce que les capacités de production d’énergie renouvelable sont très loin d’égaler la demande aujourd’hui. Augmenter la production d’ENR et diminuer la consommation prendront de longues années.

Ensuite parce que la capacité de production d’électricité à partir de sources renouvelables varie sur l’année (hydraulique) ou dans l’heure (photovoltaïque et éolien) et impose soit :

  • Des capacités complémentaires à même de prendre le relais en cas de baisse de production des EnR (essentiellement à partir des énergies fossiles), comme c’est le cas aujourd’hui
  • Des avancées significatives en termes de stockage (station de transfert d’énergie par pompage, stockage de masse à partir de batteries, hydrogène…) qui permettraient de répondre autrement à ces aléas

Les progrès significatifs en matière de stockage demanderont du temps  et confirment à moyen terme la complémentarité EnR – énergies fossiles.

Et le gaz naturel dans tout ça ? quel avenir a-t-il ?

A court terme, les chiffres montrent que le gaz naturel, pour certains usages, remplace peu à peu le pétrole et le charbon. Le gaz naturel étant l’énergie fossile la moins carbonée, ces substitutions servent les objectifs de réduction d’émission de CO2.

Par ailleurs, le gaz naturel permet de couvrir les aléas de disponibilités des ENR, d’assurer le back up en termes de production d’électricité notamment à travers les CCCG (centrales à cycle combiné gaz) avec un meilleur rendement environnemental.

A moyen terme, les ENR pourront s’appuyer sur les infrastructures existantes (utilisées aujourd’hui par les énergies fossiles) pour se développer. Les grands acteurs de l’énergie l’ont bien compris. Par exemple, GRTgaz  a ouvert son réseau aux injections de biogaz et se présente comme un « vecteur de la transition énergétique ».

Le gaz naturel semble donc avoir une place durable dans le bouquet énergétique français.

Pourquoi le captage de CO2 ne décolle-t-il pas ?

Un autre indice de la volonté de pérennisation des énergies fossiles sont les efforts faits par les acteurs en termes de recherche et développement pour réduire les impacts environnementaux de leur activité. Le recours à des technologies de captage et de stockage de CO2 (CSC) en est l’illustration, comme le reconnaissent de nombreux experts et organismes internationaux. Malgré cela, les projets de CSC rencontrent de nombreuses difficultés dans plusieurs régions européennes, pour deux principales raisons : le financement et l’acceptabilité des stockages souterrains.

Quelle réponse au gaz et pétrole de Schiste ?

On ne peut pas parler de l’avenir des énergies fossiles sans parler du pétrole et du gaz de schiste qui ont renversé la donne énergétique aux USA en leur permettant de devenir exportateur et de faire baisser drastiquement les prix de l’énergie. La question en France est à ce jour à la fois mal maîtrisée et très controversée. Mal maîtrisée car les réserves sont encore inconnues à ce jour. Selon Michel Rocard, « Pour l’Europe, [la France] serait au gaz de schiste ce que le Qatar est au pétrole. » On trouverait des milliards de mètres cubes de gaz de schiste dans le Sud Est et des milliards de barils de pétrole de schiste sous le bassin parisien. Cependant, même si les estimations vont bon train, seuls des puits d’exploration permettraient de confirmer s’il y a de telles réserves dans le sous-sol français, en quelles quantités, et s’il est exploitable.

Controversée ensuite car l’empreinte environnementale du gaz de schiste est encore incertaine et beaucoup l’accusent d’être néfaste pour nos sous-sols.

La France ne pourra pas durablement éluder cette question à la fois économique, environnementale et sociétale.

De nombreuses pistes existent pour l’avenir. Les acteurs devront faire des choix car les capacités de financement ne sont pas illimitées. Faut-il concentrer les investissements sur les EnR ou au contraire les répartir de façon ciblée entre les différentes énergies ?

La transition énergétique ne se fera pas en un jour. Les énergies renouvelables sont encore en phase d’apprentissage et ne peuvent pas à ce jour répondre à la demande en énergie de manière pérenne. Comme nous le montrent les difficultés économiques de l’éolien et du solaire, il faudra du temps pour qu’elles se forgent des modèles d’affaire stables et durables. Il faut donc continuer à investir intelligemment sur les énergies fossiles afin de porter la transition et de préparer l’avenir, tout en encourageant l’innovation et la R&D pour réduire leur impact environnemental.

 

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