Choc extrême : comment se préparer à une crue centennale en Île-de-France ? (1/2)

Les occurrences de crue se sont multipliées au cours des dernières décennies. Entre 2002 et 2014 363 inondations ont été enregistrées en Europe avec plus de 150 milliards d’euros de dégâts, dont plusieurs crues de grande ampleur : Prague en 2012, Europe centrale en 2013, Balkans en 2014. Elles constituent l’une des catastrophes naturelles les plus fréquentes et il est donc nécessaire de s’y préparer à deux niveaux. Au niveau individuel, pour faire face aux impacts sur les ressources, et au niveau collectif, par la prise en compte de l’ensemble des adhérences entre les secteurs d’activités qui seront impactés par la crise. L’exercice EU SEQUANA 2016 à venir est une occasion unique d’exercer cette coordination intersectorielle en Île-de-France.

La crue centennale, plus qu’une simple inondation

Le choc extrême le plus probable

La crue centennale en Île-de-France est la conséquence d’une crue de la Seine, de l’Yonne et de la Marne avec les conditions météorologiques adéquates (températures négatives, gel progressif des couches supérieures des sols, précipitations importantes) entraînant une montée progressive des eaux.

La dernière catastrophe de ce type remonte à 1910. La Seine atteignit son niveau maximal de 8,62m en une dizaine de jours, avant de revenir à son niveau initial après 35 jours de décrue. Cette inondation causa d’importants dommages à l’économie locale, pour un coût total avoisinant les 15 milliards d’euros.

Le scénario d’une crue centennale identique ou supérieure à celle de 1910 est aujourd’hui le scénario de catastrophe majeure le plus probable en Île-de-France (probabilité de 1/100 chaque année).

Une menace avérée et des faiblesses identifiées

Les dernières crues importantes connues en Europe ont contribué à révéler la nécessité de mieux se préparer et de renforcer la résilience des villes. Ainsi cette menace en Île-de-France est désormais au centre des attentions depuis plusieurs années, avec notamment :

  • un contexte réglementaire fort de l’Union Européenne via la directive 2007/60/CE, qui enjoint les États membres à établir des Plans de Gestion des Risques d’Inondation (PGRI) ;
  • un rapport de l’OCDE – « Étude de l’OCDE sur la gestion des risques d’inondation : la Seine en Île-de-France 2014 » – qui évalue à plus de 50 milliards d’euros l’impact d’une crue centennale. Elle souligne les faiblesses multiples de la France pour se préparer et faire à face à la crue, notamment sur le déficit de gouvernance, une résilience inégale ainsi que l’absence de vision stratégique globale et commune entre les acteurs concernés. La mise en place d’objectifs précis en termes de résilience et la responsabilisation des acteurs font partie de ses recommandations principales.

Même si Paris est maintenant mieux protégée qu’en 1910, elle est également plus vulnérable sur certains aspects. En effet, l’urbanisation croissante et l’interdépendance des infrastructures critiques ont largement accentué les impacts potentiels d’un tel scénario.

Des impacts multiples sur les ressources des entreprises

Cette crise, multiple et complexe, couperait l’Île-de-France en trois zones isolées, affecterait plus de 300 communes et toucherait tous les réseaux d’opérateurs essentiels pour la vie économique et sociale de l’Île-de-France qui seraient rendus en grande partie indisponibles : distribution d’électricité, distribution d’eau, opérateur télécom, assainissement, transports routiers, transports en commun…

Les conséquences de la crise seraient renforcées par un véritable « effet domino » lié à l’interdépendance des entreprises et des réseaux, une rupture de service en entraînant une ou plusieurs autres.

Le fonctionnement de l’État, des institutions et de l’activité économique en général sera fortement perturbé et près de 5 millions de citoyens seront affectés, directement ou indirectement.

Anticiper la crue : une préparation en deux volets

Au vu des multiples impacts régionaux d’une crue centennale de la Seine, une simple réponse « individuelle » de chaque organisation – bien que nécessaire – n’est pas suffisante. Une réponse collective doit également être apportée pour adresser l’ensemble des problématiques.

En effet, au niveau individuel, chaque acteur doit se préparer à la crise à travers la mise en place d’un Plan de Continuité d’Activité dédié, adapté à ses métiers et aux spécificités de la crue centennale. Celui-ci doit intégrer les dépendances aux réseaux et autres structures impactées par la crise : télécommunications, fournisseurs, transports… Mais sans la mise en place d’une stratégie partagée, ces plans individuels ne seront pas efficaces. Une approche globale constitue l’un des principaux enjeux de la prévention des risques d’inondation. En effet, les adhérences entre les entreprises sont de plus en plus importantes, notamment avec les fournisseurs de transports ou de utilities (télécom, énergie…) qui sont indispensables à l’ensemble des entreprises en Île-de-France, nécessitant par conséquent une collaboration très rapprochée en cas de crise.

Aujourd’hui, un réel dynamisme multi-acteur est impulsé par le Secrétariat Général de la Zone de Défense et de Sécurité (SGZDS) de Paris autour du futur exercice EU SEQUANA 2016.

Dans le prochain article, nous ferons un focus sur la préparation individuelle et les quatre volets du Plan de Continuité d’Activité « choc extrême » et nous reviendrons sur la préparation collective avec l’exercice « EU SEQUANA 2016 »,la simulation d’une crue centennale de la Seine grandeur nature.

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