La France grelotte, le réseau électrique souffre

[Tribune rédigée en collaboration avec  Véra Drouhet et Clément Le Liepvre]

La France a atteint un pic de consommation électrique historique le mercredi 8 février à 19h. Quelles en sont conséquences et les mesures mises en place ? Quelles opportunités se dégagent ? Décryptage.
Avec les chutes de températures de ces derniers jours, la demande en gaz et électricité à littéralement explosé partout en Europe et particulièrement en France, suréquipée en dispositifs de chauffage électrique. Ainsi, la demande française en gaz la plus élevée de l’histoire a été enregistrée vendredi, à 3.198 gigawattheures, selon les chiffres de GRTGaz. Parallèlement, le pic de consommation électrique a atteint un record historique  mercredi avec 101.700 MW appelés à 19h. Pourtant, EDF le clame haut et fort : le black-out national devrait être évité, principalement grâce à nos 55 centrales nucléaires en fonctionnement, et aux importations

Quelles conséquences  a donc la vague de froid ?

 

Envolée du coût du kilowattheure
La demande est telle que les ressources se raréfient et se renchérissent. lundi 06 février, le prix du mégawattheure de gaz pour livraison aujourd’hui s’élevait à 34,68 euros, en hausse de 48 % sur une semaine. « Une transaction a eu lieu vendredi à 36 euros, niveau jamais atteint depuis la création de la Bourse du gaz en novembre 2008 », selon un porte-parole. Dans l’électricité, les prix ont eux aussi connu des tensions.

Black-out des régions isolées
Même si le risque de black-out national est écarté, certaines régions françaises isolées sont particulièrement éprouvées.  Ainsi, PACA et la Bretagne produisent seulement 10% de leur consommation électrique, le reste étant acheminé via le réseau national. Si un accident survient sur cette ligne d’acheminement à très haute tension ou s’il y a surconsommation, aucune alimentation de secours ne peut prendre le relais : c’est le black-out. Ainsi, dans ces deux régions, RTE met-il en pratique l’ « effacement ». «On coupe volontairement quelques clients pour permettre à certains points prioritaires, hôpitaux ou centres de contrôle, de rester alimentés », explique Catherine Greilveldinger, directrice de RTE Sud-Est.

Quelles actions sont elles envisageables ?

 

Sensibiliser les gros consommateurs aux économies d’énergie : Ecowatt

RTE, transporteur de l’électricité et responsable de l’équilibre national entre l’offre et la demande, a mis en place un programme d’incitation à la réduction des dépenses en période de pointe, Ecowatt. Par exemple, Keolis, exploitant du réseau de métro rennais, s’est inscrit au programme Ecowatt afin d’être tenu informé des alertes de consommation. Ainsi lors des pics, l’exploitant a décidé de diminuer la vitesse de ses rames. Passant de 60 à 54 km/h, le changement n’est pas perceptible par les usagers et permet une baisse de consommation d’électricité de 300 à 500 kW soit près de 10 à 20% de la consommation totale du métro lors des alertes. D’après RTE, «l’ensemble des gestes de réduction de consommation réalisés sur le territoire breton entraîneraient de 1,5 à 2% d’économies d’électricité pendant les pics, soit l’équivalent de la consommation d’une ville comme Brest» conclut Sandrine Morassi, responsable de la communication de RTE Ouest.

Les crises de grands froids, une opportunité ?

 

Finalement, ces vagues de froid fortement médiatisées peuvent constituer une opportunité pour la préparation du futur du marché de l’électricité. En effet, la gestion de l’électricité doit évoluer pour trois raisons majeures : limiter le coût économique des moyens de production de pointe,  en réduire l’empreinte écologique et faciliter l’indépendance énergétique de la France.

Un levier majeur pour atteindre ces objectifs est d’amener le secteur résidentiel à réduire ses consommations et à les déplacer hors périodes de pointe. Face à un prix de l’énergie relativement bas et quasi constant, cela constitue en soi un défi pour les énergéticiens.
La filière électrique a préparé une batterie d’outils : le suivi de consommation, l’alerting en cas de surconsommation, les conseils, la tarification variable, le pilotage à distance des équipements, l’effacement diffus, … Mais faute d’appétence client, les business modèles de ces services ne se confirment pas. Finalement, cette période de risque de black-out contribue à cette évolution de mentalités inéluctable.

Le développement des services évolués de gestion de l’énergie pourrait donc profiter de ce gel des températures. Les crises sont souvent des moteurs d’innovation , un black-out national pourrait être celui de l’avènement de la Smart Energy !

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