Pilotage économique du SI : les limites de la méthode ABC

La méthode ABC (Activity Based Costing) née aux Etats-Unis à la fin des années 80 est régulièrement utilisée par les DSI notamment depuis qu’elles ont vu le poids de leurs charges indirectes augmenter et qu’elles ont engagé des démarches de tarification des services. À l’épreuve de la réalité, la méthode reste complexe à mettre en œuvre.

 Une méthode à la mode notamment pour la mise en place de tarification de services

L’attrait des DSI pour la méthode ABC s’explique en partie par leur structure de coûts qui comporte une part importante de charges indirectes notamment depuis ces dernières années avec les efforts d’industrialisation et de mutualisation, comme par exemple la mise en place de centres de services partagés.

En parallèle les DSI passant d’une logique de centre de coûts à centre de profits sont encouragées à refacturer l’intégralité des services qu’elles délivrent. La méthode ABC est généralement utilisée en étape préalable à cette tarification des services. Elle permet de déterminer précisément ses coûts de revient par service et donc de calculer un tarif assurant la rentabilité dudit service. La méthode promet ainsi la mise en œuvre d’un modèle de pilotage de la rentabilité de chaque service et donc de l’ensemble de l’activité de la DSI.

À  l’épreuve de la réalité, de nombreuses limites…

La réalité s’avère souvent plus complexe, nombreux projets à base d’ABC n’ayant jamais réellement abouti, du fait sans doute du manque de compétences économiques des équipes informatiques, mais aussi, et surtout par la complexité et les limites de la méthode ABC dans son application au monde du SI.

 1 – Des années d’effort pour obtenir des résultats probants

La construction d’un modèle économique à l’aide de la méthode ABC se fait de façon itérative et empirique. De nos différentes expériences, nous estimons qu’un modèle économique à base d’ABC donne des résultats concluants après trois ans de mise en service : un an de mise en place, puis deux ans pour corriger et affiner les hypothèses de construction.

 

 2 – Un modèle qui s’adapte lentement et difficilement aux évolutions de service

La lenteur de mise en œuvre de la démarche ABC peut également s’avérer contradictoire avec l’évolution rapide des technologies et du sourcing dans les DSI. Ces évolutions peuvent en effet remettre en cause les hypothèses et les inducteurs de construction du modèle, et leur mise à jour s’avère au fil de l’eau complexe et chronophage.

3 – Une variabilité des prix difficilement acceptable par les métiers

Par construction, la méthode ABC implique une interdépendance entre l’ensemble des éléments puisqu’il s’agit de répartir 100% des coûts sur une liste d’activité donnée. Par conséquent, la modification d’une activité ou d’un inducteur se répercute sur l’ensemble du modèle entrainant une forte variabilité des coûts par service et donc des prix affichés aux Métiers.

4 –Des résultats difficilement benchmarkables

Bien que certains organismes aient proposé des modèles ABC de référence, il n’existe pas de standard reconnu par le marché concernant les ressources, activités et services (ainsi que les ventilations de coûts) du modèle ABC appliqué à une DSI. Cette absence s’explique notamment par les grandes disparités entre les différentes DSI qui nécessitent une individualisation du modèle, des listes d’activités et d’inducteurs de couts. À ce titre, les benchmarks externes restent toujours en partie contestables.

5 – Une charge de travail non négligeable

La méthode ABC requiert une connaissance approfondie de la DSI, de ses activités et de l’utilisation de ses ressources. Sa mise en œuvre devra donc associer évidemment le management de la DSI et le contrôle de gestion mais également les opérationnels seuls à même de définir finement les activités et les inducteurs.

Cette mobilisation de l’ensemble des collaborateurs génère une charge de travail non négligeable et a un impact sur l’outillage (à adapter voire à complexifier pour supporter le modèle), coût indirect qu’il faudra d’ailleurs réintégrer dans le modèle via un inducteur adapté…

 …in fine, un modèle sous-exploité

Dans le cas où la méthode ABC est adoptée pour identifier les tarifs dans une logique de facturation, les prix calculés sont souvent discutés et remis en cause au regard des tarifs pratiqués sur le marché. Une mécanique de gestion complexe est alors mise en œuvre pour corriger les écarts, ce qui finalement revient à « tordre » le modèle. Trop d’efforts pour construire des tarifs précis finalement réajustés sont donc demandés par la méthode. Autant s’en passer et revenir aux fondamentaux en simplifiant drastiquement le modèle de pilotage économique à travers la réalisation d’arbitrages et l’abandon de certains axes de suivi comme l’analysé de la rentabilité par service et par activité.

Pour en lire plus sur le pilotage économique, consultez la Synthèse Solucom : “Pilotage économique du SI –  de la réduction des coûts au pilotage de la performance : les clés de l’IT fitness” .

 

Back to top