Les différents visages relationnels des banques en France

Le secteur bancaire pèse 2,8% du PIB [1] avec 99% de Français qui ont un compte bancaire et près de 78 millions de comptes. Ce secteur est, depuis quelques années, confronté à plusieurs mutations : en premier lieu, la multi-bancarisation des clients (23% des français ont des comptes dans plusieurs banques[2]) ; ensuite le changement d’habitude de consommation et les nouveaux usages des clients (68% des internautes consultent leur compte bancaire en ligne au moins une fois par semaine[3]) ; sans oublier enfin l’arrivée de nouveaux acteurs dans le secteur, qui incite les banques françaises à revoir leurs modèles et à s’adapter à ces changements. Cette adaptation se manifeste par l’émergence de deux principaux segments dans le marché de la banque à distance : les pure players d’une part, les agences virtuelles de l’autre.

Un nouveau paysage bancaire : pure players versus agences bancaires à distance

Les pure players de la banque à distance sont historiquement des établissements d’épargne ou des courtiers qui proposent une relation exclusivement à distance et sur internet. Parmi eux, on peut par exemple citer en France Boursorama Bank, ING Direct, Fortuneo, Hello Bank et Monabanq. Si ces acteurs adoptent très souvent une stratégie low-cost pour attirer leurs clients, ils restent dépendants des acteurs traditionnels puisqu’un nouveau client d’un pure player doit saisir les coordonnées bancaires de son compte principal pour finaliser son adhésion. Aujourd’hui, le principal défi de ces banques est l’acquisition de clients, qui passe par l’amélioration de la notoriété et la confiance des clients dans leur modèle.

En réponse à la présence de plus en plus importante des pure players, les banques traditionnelles ont adopté une stratégie défensive pour affirmer leur présence sur internet et proposer des services à distance : la Net Agence de BNP Paribas, elcl de LCL, La Banque Postale Chez Soi de La Banque Postale, Agence Directe de la Société Générale.. Les agences virtuelles sont adossées à un groupe bancaire traditionnel dont elles bénéficient de l’historique et de l’expertise. Leur  stratégie tarifaire est généralement identique à celle des agences physiques, avec souvent des offres promotionnelles pour les clients en ligne. Leur stratégie est basée sur la confiance des clients et la notoriété de leur marque et une proposition de services à distance innovants. Leur principal défi est la fidélisation des clients et la gestion du risque de cannibalisation entre agences et sites internet.

Image de marque et notoriété

En France, le NPS (Net Promoter Score) des pure players est plus favorable que celui des banques de réseaux. Cet indicateur mesure la différence entre la proportion de clients prêts à recommander (prescripteurs) leur banque de détail et ceux qui ne le sont pas (détracteurs) Il s’avère défavorable aux banques françaises puisque leur NPS s’établit en moyenne à -13 %. Deux banques à réseau – Banque postale (+9%) et Crédit Mutuel (+4%) –parviennent à avoir plus de promoteurs que de détracteurs, tandis que deux banques en ligne – Boursorama et ING – peuvent même se targuer d’avoir pour promoteurs plus de la moitié de leurs clients (respectivement 59% et 54), soit des scores respectifs de +51% et +48%[4].

Parmi les critères qui permettent d’évaluer ce score, on retrouve les canaux digitaux (c’est-à-dire « la possibilité d’utiliser quotidiennement, de façon autonome et efficace, le service bancaire »). Ce critère renforce la recommandation client sans pour autant la desservir.

Pour quelle stratégie opter ?

Les banques françaises à distance adoptent des nouvelles approches qui les différencient peu les unes des autres. Certains pure players ont mis en place des agences physiques revisitées. À titre d’exemple,  ING Direct propose l’ING Direct Café qui ressemble à un espace détente et propose des services bancaires aux clients. Les agences bancaires virtuelles proposent quant à elles des services de mise en relation différenciants par rapport aux pure players (Chat, Visioconférence, SMS, Web Call Back).

Pour accompagner l’évolution des usages des clients, les banques tendent néanmoins à proposer différentes approches. Axa a ainsi lancé en début d’année 2014 une offre bancaire 100% mobile sous la marque SOON. La Banque Postale teste quant à elle un service de paiement par authentification vocale dénommé Talk to pay. De leurs côtés, trois banques françaises (BNP Paribas, Société Générale et La Banque Postale) se sont associées pour proposer Paylib…

Certaines banques, enfin,  misent sur l’open data et le décloisonnement des données pour appuyer leur stratégie d’innovation relationnelle et proposer au client une expérience client et des services adaptés à ces usages. Pour y parvenir, deux banques proposent des Open APIs (Application Programming Interface), c’est-à-dire qu’elles permettent à certains développeurs externes à la banque d’accéder aux informations de leur système d’information (mis à part  les données personnelles des clients), pour développer de nouvelles applications. La première initiative a été développée par le crédit Agricole (CAStore) et a permis de mettre à disposition 39 applications gratuites. La deuxième initiative a été mise en œuvre par Axa en 2012.

Les enjeux de demain pour les banques françaises

Afin de construire le modèle de demain, les banques doivent miser sur quatre éléments clés :

  • Créer de la proximité avec les clients en proposant une expérience utilisateur globale et cohérente
  • Offrir des services adaptés en se basant sur la gamification
  • Mettre en cohérence les différents canaux proposés au client (agences physiques, agence en ligne, applications mobiles, réseaux sociaux, etc.)
  • Faire de la donnée en temps réel un vrai atout stratégique pour profiler, cibler et personnaliser

La prise en compte de ces enjeux permettrait aux banques d’adopter des stratégies proactives pour contrecarrer l’arrivée de nouveaux acteurs dans le secteur et l’évolution rapide des usages des clients.



[1] Rapport de la Fédération Bancaire Française : « La Banque des particuliers et des entreprises ». 2014.

[2] Enquête IFOP. Mai 2013

[3] Enquête IFOP. Mai 2013

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